La qualité de l'air intérieur, un gros enjeu pour notre santé
La qualité de l'air intérieur, un gros enjeu pour notre santé
Depuis quand sait-on que l’air qu’on respire, impalpable et invisible, peut nous rendre malades ? Pendant longtemps, le lien n’a pas forcément été évident. Mais le doute persistait. Alors on brûlait de la sauge, du romarin ou du laurier, pour purifier aussi bien les âmes que le lieu de vie ! Lors de la grande épidémie de peste au Moyen Âge, les médecins portaient ainsi un masque avec un long bec rempli d'herbes et de parfums, pour tenir éloignées les “mauvaises odeurs”. Plus tard, les épisodes de pollution industrielle, notamment à Londres dans les années 1950, engendrent les premiers décès conséquents au sein de la population. Progressivement, l’inquiétude portée à la pollution atmosphérique extérieure se déporte à l’intérieur des foyers. Que respirons-nous à la maison ?
Un intérêt récent
En France, la toute première loi érigeant le droit de “respirer un air qui ne nuise pas à notre santé” est votée en 1996. C’est la Loi sur l’Air et l’Utilisation Rationnelle de l’Énergie (LAURE), qui établit de grands principes comme celui de la surveillance de la qualité de l’air assurée par l’État et déléguée aux Associations agréées de surveillance de la qualité de l’air (AASQA) présentes dans chaque région (Air Breizh, Atmo Occitanie, Atmo Auvergne Rhône-Alpes, Airparif, Lig’Air…).
Concernant l’air intérieur spécifiquement, les premières actions arriveront en 2004 avec le premier Plan National Santé Environnement (PNSE 1), conforté par le Grenelle de l’Environnement de 2007, puis les PNSE 2 et 3. Concrètement, cela se traduit par une campagne nationale d’évaluation de la qualité de l’air intérieur dans 600 logements français, la mise en place de l’étiquetage des produits de construction et de décoration ou encore la surveillance obligatoire de la qualité de l’air intérieur dans les établissements recevant du public (crèches, écoles, lycées...).
Les chiffres de la qualité de l’air intérieur
En moyenne, nous passons 90% de notre temps dans des espaces intérieurs, et ce bien avant la pandémie de Covid-19. Un adulte respire chaque jour entre 12 000 et 14 000 litres d’air. Or, l’impact d’une mauvaise qualité de l’air peut engendrer des problèmes respiratoires et/ou cardio-vasculaires. Pesticides, particules fines, COV (Composés organiques volatils), phtalates, hydrocarbures, radon (gaz radioactif)... Toutes ces familles de composés chimiques peuvent être présentes dans les environnements intérieurs. Rien que dans la famille des COV, plus de 400 composés chimiques sont identifiables dans l’air.
En 2014, dans le cadre du programme de travail de l’Observatoire de la qualité de l’air intérieur (OQAI), l’Anses (Agence nationale de sécurité sanitaire de l'alimentation, de l'environnement et du travail) et le CSTB (Centre scientifique et technique du bâtiment) ont travaillé sur le coût socio-économique d’une mauvaise qualité de l'air intérieur (décès prématurés, traitement des pathologies et hospitalisation, absentéisme en entreprise…).
Le groupe de scientifiques souligne : "On considère comme polluant de l’air intérieur tout polluant présent dans l’air des environnements intérieurs indépendamment de sa source, qu’elle soit spécifique à cet environnement et ses occupants (chauffage, cuisson, mobilier, produits d’entretien, etc.), ou bien extérieure à celui-ci, comme la pollution atmosphérique ou la pollution par les sols par exemple". Mais leur étude concerne précisément 6 polluants prioritaires, particulièrement présents dans les espaces intérieurs, problématiques pour la santé et avec des données d'exposition disponibles. Celles-ci, concernant l'impact sanitaire, datent de 2004. Elles ont été récoltées au moment de la première campagne nationale Logements (mais la deuxième est en cours : les résultats devraient arriver en 2023 !).
L'étude sur les coûts socio-économiques, publiée en 2014, a établi que cette pollution engendre plus de 28 000 nouveaux cas de pathologies et environ 20 000 décès chaque année. Le coût pour la collectivité est estimé à 19 milliards d’euros annuels.
Des substances chimiques sous surveillance
En raison de leur danger et du risque d’y être exposé dans un environnement intérieur, une dizaine de polluants sont particulièrement scrutés par les autorités sanitaires. Elles disposent toutes d’une VGAI - Valeur guide de qualité de l’air intérieur - définie par l’Anses. Établie d’après les données scientifiques disponibles, la VGAI est une concentration dans l’air en deçà de laquelle aucun effet délétère n’est attendu. Pour la plupart des polluants, on trouve deux valeurs guides, une qui reflète une exposition sur le long terme, une autre pour une exposition de courte durée, de quelques heures seulement.
Sur son site, l’Anses consacre une page à ces polluants et leurs valeurs limites. Nous nous attardons ici sur deux composés chimiques, le formaldéhyde et le benzène, qui possèdent en plus d’une valeur guide pour l’air intérieur (VGAI), une valeur limite réglementaire. La première a une portée scientifique pour limiter au maximum les risques, la seconde est une obligation de résultat. Dans les établissements recevant du public, si les valeurs limites sont dépassées, toute une chaîne de mesures doit s’enclencher, du préfet jusqu’à l’information du public pour chercher les sources d’émissions et y remédier.
Le formaldéhyde
Pas de chance, on le trouve absolument partout... Si bien qu’on dit qu’il est “ubiquiste”. Présent à l’état naturel (par exemple, le bois brut non traité est une - faible - source d’émission de formaldéhyde) et dans de nombreux produits de la vie courante, il pose un véritable problème sanitaire. Il peut en effet provoquer des réactions allergiques. Surtout, depuis 2012, il est classé cancérogène avéré par le CIRC (Centre international de recherche contre le cancer). Les données scientifiques sont suffisantes pour établir un lien entre une exposition à long terme au formaldéhyde et un risque de développer un cancer nasopharyngé. L’objectif est donc de limiter son exposition.
Les sources d’émission de formaldéhyde sont :
Tous les phénomènes de combustion : la fumée de cigarette, le barbecue à charbon, l’encens et dans une moindre mesure les bougies parfumées, le brûlage de ses déchets verts (qui soit dit en passant est interdit !)...
Des produits d’entretien, de bricolage, de construction.
Des meubles
Enfin, le formaldéhyde est un composé chimique particulièrement sournois, car c’est un sous-produit de dégradation. Par exemple, le limonène, particulièrement apprécié pour son odeur citronnée, est présent dans de très nombreux produits de grande consommation (parfums et désodorisants, produits d’entretien, bougies parfumées, huiles essentielles d’agrumes, cosmétiques…). Or le limonène réagit naturellement avec les UV et l’ozone présent dans l’atmosphère pour former des composés secondaires dont… le formaldéhyde !
Le benzène
Il est à la fois caractéristique d’une pollution automobile, à cause de sa présence dans l’essence, et des activités industrielles, car c’est un solvant. Dans les environnements intérieurs, il est mesuré pour évaluer le transfert entre la pollution extérieur vers l’intérieur. Le benzène est également émis lors des phénomènes de combustion et par certains solvants.
Comme tous les solvants, il peut provoquer des effets neurologiques immédiats : maux de tête, nausées, sensation d’ivresse, perte d’équilibre… Sur le long terme, il peut augmenter le risque de leucémies. Il est également classé comme cancérogène avéré par le CIRC.
Alors, quelles sont les bonnes pratiques pour éviter de respirer tous ces polluants chimiques ? On vous explique tout ça dans notre article "Comment préserver la qualité de l’air intérieur ?" !